Rivemorte, Chap.82
Publié le par Blanche
Elland bougonne et marmonne. Bien sûr, Pèire a raison : Jehanne n'a plus vraiment les moyens de comprendre l'implication de ses gestes. Mais ce n'est pas une raison pour faire du mal aux autres, même dans le but d'en apprendre plus sur les gargouilles. Mais un détail l'intrigue, et il demande à Pèire, espérant que le tavernier puisse lui répondre :
- Mais tu penses que c'est permanent ? Je veux dire, connaître les sentiments d'Echidna ?
- Je n'ai aucun moyen de le savoir. Il faudra voir avec le temps...
- Et euh … tu n'étais pas inquiet de ne pas me voir pendant tout ce temps ?
Elland, gêné par cette question, fixe obstinément son assiette vide. S'il avait relevé la tête, il aurait vu l'air attendri de Pèire, et toute l'affection qu'il éprouve pour lui.
- Non. Echidna m'envoyait de telles ondes de bonheur que je ne pouvais pas m'inquiéter pour ta sécurité. J'aurais dû, pourtant, car ces moments passés avec Jehanne n'étaient pas si tranquilles. Je me suis fié à Echidna, sans penser un seul instant qu'elle aurait pu être si partiale. Mais je me demandais vraiment où tu étais passé et ce que tu fabriquais. J'ai même pensé que tu avais trouvé une piste très sérieuse pour Ménandre.
- Impossible. Elle m'avait attaché. Avec une corde animée.
- Une corde animée ?
- Je ne suis pas fou, Pèire. Quand j'essayais de la défaire, elle se resserrait autour de ma cheville. Et il a suffit que Jehanne la touche pour qu'elle relâche la pression.
- Tu vois, c'est ce que je disais. Jehanne a bon fond, sinon, elle aurait perdu le contrôle de la corde depuis longtemps.
- C'est une corde enchantée par les Clamadinis, n'est-ce pas ?
- Sans doute.
- Comment a-t-elle pu se la procurer ?
- Aucune idée. Mais il reste quelque uns de leurs objets, en ville. Souvent hors d'état de nuire, car devenus dangereux. Pour les autres, ils sont soigneusement cachés par leurs propriétaires, de peur d'attiser la convoitise, ou la peur pour ceux qui s'en souviennent.
- Mais ça fait longtemps, non, que la magie a disparu de Rivemorte ? Je ne me souviens pas d'en avoir jamais vu.
- Je pense que ça remonte à une centaine d'années. Mais n'oublie pas que Jehanne est bien plus vieille qu'elle ne le paraît. Elle peut parfaitement avoir cet objet depuis des dizaines d'années.
- Oui mais … comment ça se fait qu'elle soit si âgée ? Ses explications n'étaient pas très claires.
- C'est le moins qu'on puisse dire... Mais comme elle l'a expliqué, sa vie est liée aux gargouilles. En leur donnant la vie, elle rallonge la sienne. Après, impossible de savoir si c'est volontaire ou non.
Pèire leur verse à eux deux une bonne rasade d'hydromel, puis vient s'asseoir près du voleur. Il a les traits tirés : sans doute n'a-t-il pas dormi depuis la dernière fois qu'Elland l'a vu. Faisant lentement tourner son verre sur lui-même, Elland demande :
- Et pour Ménandre, vous avez pu avancer ?
- Un peu, oui. Le guetteur de Thémus a vu deux hommes rentrer dans le bâtiment. Ils n'en sont sortis qu'une heure plus tard. Il les a suivi et ça l'a mené jusqu'à un autre bâtiment, situé non loin du lieu de l'attaque. L'intérieur de l'appartement, qu'on soupçonne être leur repaire, est très semblable au premier : rien d'intéressant à l'intérieur.
- Proche du lieu de l'attaque ? Est-ce qu'ils auraient pu amener Ménandre là-bas ?
- C'est avec cette hypothèse que nous avons fouillé les lieux. Mais nous n'avons trouvé aucune preuve d'un quelconque passage de Ménandre. Tout est très vide, comme s'ils prenaient toutes les dispositions pour que personne ne puisse rien apprendre.
- Ce qui est assez logique. Reste à savoir de quelle manière ils se servent de ces planques et à quelle fin.
- C'est le cœur du problème. Une fois que nous en saurons plus, nous pourrons agir plus efficacement. En attendant, Thémus a placé un homme en surveillance de leur second repaire.
- Et les gargouilles qui survolent la ville, ça a donné quelque chose ?
Pèire étouffe un grondement. Son visage s'est complètement fermé. Il se lève d'un geste vif, prend la bouteille d'hydromel et se ressert une chope généreuse. Puis, d'une voix vibrante de colère, il lâche :
- Non. Ils ne nous aident plus.
Le reste de sa phrase se termine en jurons particulièrement fleuris. Elland, avec prudence, décide qu'il est préférable de ne pas insister pour le moment et tente de changer de sujet. Mais Pèire ronchonne toujours et sa pitoyable tentative tombe à l'eau.
- Mais tu penses que c'est permanent ? Je veux dire, connaître les sentiments d'Echidna ?
- Je n'ai aucun moyen de le savoir. Il faudra voir avec le temps...
- Et euh … tu n'étais pas inquiet de ne pas me voir pendant tout ce temps ?
Elland, gêné par cette question, fixe obstinément son assiette vide. S'il avait relevé la tête, il aurait vu l'air attendri de Pèire, et toute l'affection qu'il éprouve pour lui.
- Non. Echidna m'envoyait de telles ondes de bonheur que je ne pouvais pas m'inquiéter pour ta sécurité. J'aurais dû, pourtant, car ces moments passés avec Jehanne n'étaient pas si tranquilles. Je me suis fié à Echidna, sans penser un seul instant qu'elle aurait pu être si partiale. Mais je me demandais vraiment où tu étais passé et ce que tu fabriquais. J'ai même pensé que tu avais trouvé une piste très sérieuse pour Ménandre.
- Impossible. Elle m'avait attaché. Avec une corde animée.
- Une corde animée ?
- Je ne suis pas fou, Pèire. Quand j'essayais de la défaire, elle se resserrait autour de ma cheville. Et il a suffit que Jehanne la touche pour qu'elle relâche la pression.
- Tu vois, c'est ce que je disais. Jehanne a bon fond, sinon, elle aurait perdu le contrôle de la corde depuis longtemps.
- C'est une corde enchantée par les Clamadinis, n'est-ce pas ?
- Sans doute.
- Comment a-t-elle pu se la procurer ?
- Aucune idée. Mais il reste quelque uns de leurs objets, en ville. Souvent hors d'état de nuire, car devenus dangereux. Pour les autres, ils sont soigneusement cachés par leurs propriétaires, de peur d'attiser la convoitise, ou la peur pour ceux qui s'en souviennent.
- Mais ça fait longtemps, non, que la magie a disparu de Rivemorte ? Je ne me souviens pas d'en avoir jamais vu.
- Je pense que ça remonte à une centaine d'années. Mais n'oublie pas que Jehanne est bien plus vieille qu'elle ne le paraît. Elle peut parfaitement avoir cet objet depuis des dizaines d'années.
- Oui mais … comment ça se fait qu'elle soit si âgée ? Ses explications n'étaient pas très claires.
- C'est le moins qu'on puisse dire... Mais comme elle l'a expliqué, sa vie est liée aux gargouilles. En leur donnant la vie, elle rallonge la sienne. Après, impossible de savoir si c'est volontaire ou non.
Pèire leur verse à eux deux une bonne rasade d'hydromel, puis vient s'asseoir près du voleur. Il a les traits tirés : sans doute n'a-t-il pas dormi depuis la dernière fois qu'Elland l'a vu. Faisant lentement tourner son verre sur lui-même, Elland demande :
- Et pour Ménandre, vous avez pu avancer ?
- Un peu, oui. Le guetteur de Thémus a vu deux hommes rentrer dans le bâtiment. Ils n'en sont sortis qu'une heure plus tard. Il les a suivi et ça l'a mené jusqu'à un autre bâtiment, situé non loin du lieu de l'attaque. L'intérieur de l'appartement, qu'on soupçonne être leur repaire, est très semblable au premier : rien d'intéressant à l'intérieur.
- Proche du lieu de l'attaque ? Est-ce qu'ils auraient pu amener Ménandre là-bas ?
- C'est avec cette hypothèse que nous avons fouillé les lieux. Mais nous n'avons trouvé aucune preuve d'un quelconque passage de Ménandre. Tout est très vide, comme s'ils prenaient toutes les dispositions pour que personne ne puisse rien apprendre.
- Ce qui est assez logique. Reste à savoir de quelle manière ils se servent de ces planques et à quelle fin.
- C'est le cœur du problème. Une fois que nous en saurons plus, nous pourrons agir plus efficacement. En attendant, Thémus a placé un homme en surveillance de leur second repaire.
- Et les gargouilles qui survolent la ville, ça a donné quelque chose ?
Pèire étouffe un grondement. Son visage s'est complètement fermé. Il se lève d'un geste vif, prend la bouteille d'hydromel et se ressert une chope généreuse. Puis, d'une voix vibrante de colère, il lâche :
- Non. Ils ne nous aident plus.
Le reste de sa phrase se termine en jurons particulièrement fleuris. Elland, avec prudence, décide qu'il est préférable de ne pas insister pour le moment et tente de changer de sujet. Mais Pèire ronchonne toujours et sa pitoyable tentative tombe à l'eau.